Cet atelier pédagogique est le fruit d’une collaboration entre une enseignante de l’école primaire de Peipin et une équipe d’étudiants en architecture et aux beaux-arts[1]. Inscrit dans le cadre d’un mémoire parcours-recherche mené par l’un de ces étudiants[2], il a pour objectif de tester un dispositif participant à la découverte de l’espace par les enfants ainsi que les possibilités de transformation d’une école par ses usagers. Menée en 2016, cette expérience a fait l’objet d’un partenariat entre l’ENSA•Marseille, l’unité de recherche Project[s], l’école primaire de Peipin et l’association Graine d’archi[3]. Cette association d’étudiants de l’ENSA•Marseille a notamment pour objectif d’ouvrir les réflexions des enfants sur leur environnement proche et d’améliorer les capacités des étudiants à communiquer et prendre en compte les besoins des usagers.
De la matière à la construction de boites aux lettres
Inspiré du « tatilismo » et du travail de Bruno Munari, le Laboratoire Tactile s’est déroulé sur quatre jours au cours desquels les enfants de l’école primaire de Peipin ont travaillé à la réalisation de boites aux lettres pour l’ensemble de l’école.
La première matinée a été consacrée à un travail individuel de découverte et d’expérimentation de la matière. Pour cela, trois grandes « tables des matières » regroupaient du bois, de la terre et du textile sous différentes formes. Munis d’une feuille de route, les enfants devaient tester un certain nombre d’action sur les échantillons à disposition. Répartis en groupes par la suite, ils ont reçu des consignes de réalisation (dimension, classe destinataire de la boite aux lettres, etc.) ainsi qu’un thème particulier pour chaque équipe : une boite aux lettres volante, dansante, mobile, gourmande, à deux et multifonction. À partir de cette commande, les enfants ont utilisé le dessin et la maquette pour concevoir les boîtes qu’ils ont ensuite réalisées à l’aide des matériaux expérimentés le premier jour. A l’issue de l’atelier, les concepteurs ont livré les boites aux lettres à leurs futurs usagers.
Une expérience coopérative à plusieurs échelles
Lors de la préparation des ateliers, la mise en place par les enseignants d’une correspondance entre les classes et avec d’autres écoles nous a particulièrement intéressés. Inspirée des pédagogies coopératives, c’est une pratique qui dépasse le cadre de la classe et pour laquelle il n’existait aucun support. Au travers de la construction de boites aux lettres pour chacune des classes, les enfants ont ainsi travaillé pour le collectif, en valorisant une pratique coopérative existante.
Chaque boite aux lettres résulte d’un travail d’équipe composée de 3 ou 4 enfants et d’un étudiant. Afin de réaliser ensemble ce projet, les enfants ont dû apprendre à présenter des idées, argumenter mais aussi prendre des décisions communes, se répartir le travail etc. Par la suite, la livraison de l’objet fini a donné lieu à des échanges avec l’ensemble de l’école. Pour les étudiants, cette expérience a été l’occasion de travailler avec un public non-initié, d’organiser un travail en équipe et d’accompagner un processus de conception par les usagers. La préparation des ateliers elle-même a fait l’objet d’étroites coopérations. Issues de disciplines différentes, les étudiants ont eux aussi appris à travailler ensemble, à articuler leurs méthodes de travail ainsi que leurs compétences d’architectes et d’artiste. Enfin, les nombreux échanges avec l’enseignante ont permis de réunir des approches architecturale, artistique et pédagogique au sein d’un projet commun.
Une pédagogie par le projet
La démarche de conception des architectes, retranscrite dans le déroulement des ateliers, fait écho à une pratique déjà mise en place par l’enseignante : la pédagogie par le projet.
Pour les enfants, ce workshop a été l’occasion de mettre en pratique un certain nombre de connaissances requises par les programmes scolaires de l’éducation nationale. La pluridisciplinarité des ateliers a permis aux enfants d’envisager des matières habituellement séparées sous un angle nouveau, leur donnant ainsi une dimension plus concrète. Au-delà des enseignements académiques, le laboratoire tactile leur a offert la possibilité d’intervenir sur l’espace de façon utile pour l’école et de cette manière de devenir acteurs de leur propre environnement. Les différents temps des ateliers, renforcés par l’intensité du workshop, ont mis en évidence pour les enfants les différentes étapes d’une pédagogie par le projet : l’étude préalable, la conception, la réalisation et la livraison. De la même façon, la mise en place du laboratoire tactile est passée par ces quatre étapes, faisant de cette expérience un réel apprentissage pour les étudiants. En participant à l’organisation de cet atelier, ils ont ainsi développé des compétences en termes de montage de projet, de médiation ou encore de gestion de groupe.
Le laboratoire tactile a ainsi permis d’impliquer les usagers dans la transformation de leur école tout en mettant en œuvre des apprentissages partagés, aussi bien pour les enfants que pour les étudiants. L’ensemble de cette expérience a fait l’objet d’un film[4], d’une exposition et d’un mémoire de recherche sur la conception et la réalisation des écoles à l’heure actuelle, faisant de ce projet un réel travail à la croisée de la pédagogie, de la recherche et de la pratique professionnelle.
Références
[1] Marie Segonne et Emmanuelle Pons (architecture) et Julien Abie (Beaux-arts).
[2] Marie Segonne, encadrée par Stéphane Hanrot et Marion Serre – Séminaire Architecture Ville et Teriritoire
Marie Segonne est architecte et doctorante en sociologie à l’université Paris 8 au laboratoire LAVUE. Sous la direction d’Agnès Deboulet, elle travaille sur les initiatives d’urbanisme alternatif dans les quartiers précaires.
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