À la rentrée 2017, nous avons étudié dans le département “AVEC l’architecture” des bâtiments réalisés par des architectes Milanais, acteurs de l’après-guerre de la ville de Milan. Par des travaux en équipe, nous avons pu découvrir comme architectes : I. Gardella, B.B.P.R., A. Mangiarotti et B. Morassutti, M. Asnago et C. Vender et enfin Luigi Caccia Dominioni. L’ensemble de ces recherches et analyses ont permit la mise en avant d’un nouveau mouvement « Razionalismo di Maniera Milanese »1,2 . On a par la suite réalisé une exposition dans les locaux de la Maison de Architecture et de la Ville de la région PACA, courant printemps 2018. Puis, l’ENSA•M nous a permis de publier deux livrets, un sur nos travaux sur le “Razionalismo di Maniera Milanese” et un autre sur nos projets s’inspirant de ces architectes Milanais.
Luigi Caccia Dominioni
Luigi Caccia Dominioni est un architecte-designer Milanais. Il naît dans une famille noble de Novare, à 38 km de Milan. Il suit sa scolarité à Leo XIII Institute à Milan, puis intègre l’école Politecnico di Milano, d’où il est diplômé en architecture en 1936. Il y rencontre Ignazio Gardella, les frères Castiglioni et Marco Zanuso et bien d’autres.
Son coté designer le pousse à créer énormément d’objets du quotidien. Ses réalisations vont des couverts de table au mobilier. Ce lien étroit qu’il entretient entre architecture et design lui permette de fabriquer des intérieurs de qualité, qui sont de dignes représentants de l’élégance italienne. L’architecte et écrivain Ernesto Nathan Rogers le désigne, à la fin des années 1940, comme l’un des représentants du style « Milan ». Il devient un pionnier en termes de conception industrielle et c’est grâce au savoir-faire artisanal qu’il trouve son inspiration et du plaisir à produire. Dans le design, mais aussi dans ses projets architecturaux, il établira des collaborations avec les nombreux artisans du bois, du verre, de la pierre, du métal, etc.
« L’observation de l’extérieur de ses architectures révèle quant à elle une collaboration étroite avec ses constructeurs et artisans dans le but de résoudre ensemble les problèmes qu’un corps architectonique peut rencontrer dans le temps de façon durable et fonctionnelle »
(Extrait de « Lezioni di architettura », Domus n° 981, juin 2014, traduit par Audrey Tam-Tsi)
Par la minutie que lui appris le design et la collaboration avec l’artisanat, Luigi Caccia Dominioni est connu pour ses expérimentations. Il s’approprie l’industrialisation et détourne des objets de leur fonction, ses productions en témoignent comme par exemple des luminaires en phare de voiture, ou encore l’emploi de cuir comme socle de lampes. Il fait de même en architecture, utilisant par exemple de la faïence en façade, ou encore pour son désir d’avoir des constructions de qualité, il se constitue des « prismes » de travail. Il fait ressortir quatre axes, qu’il s’efforcera de traiter dans toutes ses constructions. Le premier est une stratégie conceptuelle pour les évacuations des eaux pluviales. Le second concerne les solutions pour s’abriter du soleil. Le troisième se porte sur le lien entre la vie intérieure et les extérieures. Enfin le quatrième a pour objectif de résoudre les problèmes causés par l’humidité du terrain.
« Ses grands projets architecturaux se caractérisent par sa capacité à travailler avec les bâtiments existants sans renoncer à l’utilisation de nouvelles formes et technologies. »
C’est ce regard à tous les niveaux et les détails qui m’ont fortement intéressée chez Luigi Caccia Dominioni. J’ai souhaité alors continuer mon observation et mon étude de ses réalisations pour la constitution de mon mémoire de Master. J’ai été séduite par un objet de sa production, qui me semble être la résultante des deux domaines d’action de cet architecte : architecture et design. Je veux bien entendue parler des trois types de stores qu’il a créés pour seulement trois bâtiments. Pour cela, j’ai axé mon regard sur un de ses quatre « prismes » de travail : s’abriter du soleil. Dans ce mémoire : Les protections solaires, Chez Luigi Caccia Dominioni j’ai observé vingt et un immeubles d’habitation, que l’architecte a réalisé de 1946 à 1997. Tous sont recensés dans le livre Luigi Caccia Dominioni, d’Alberto Gavazzi et Marco Ghilotti, Solferino edizioni. Mes recherches m’ont conduite à réaliser une liste d’éléments, qui selon moi étaient susceptibles d’être des protections solaires. De cette liste j’ai formé quatre grandes familles de protection. La première, un classique, regroupait les volets, à gonds, à galandages, etc. J’ai nommé la deuxième famille Architecture, elle regroupait les formes du bâti, les loggias traditionnelles ou dites « nid d’abeille », balcons, etc. La troisième regroupait les stores et enfin la dernière traitait des traitements verrier. Pour cet article je n’ai pas souhaité faire un résumé de ce mémoire. J’ai voulu parler d’une seule petite partie, qui m’intrigue et me fascine depuis l’étude faite de l’immeuble Via Vigoni. Ce sont les stores, mais surtout ceux dit « sur mesure », ils sont standards sans l’être, ils se répètent à l’identique plusieurs fois sur les façades d’un même immeuble.
Les stores
Grâce au survol des constructions de Luigi Caccia Dominioni, on observe une courte période où l’architecte a fait le choix de créer des stores « sur mesure ». Cette période fut brève, seulement 5 ans, de 1955 à 1960, et ne comporte que trois bâtiments. Ces trois ouvrages sont l’immeuble d’habitation Via G. Vigoni, le complexe d’habitation et de commerce Via Corso Italia, ainsi que celui Vicolo Santa Maria alla Porta, à Milan. Ces trois catégories de stores ont été conçus uniquement pour ces trois immeubles, on ne les retrouve dans aucun autre bâtiment de Luigi Caccia Dominioni. Leur conception, leur forme et leur mise en œuvre sortent de la standardisation de l’époque. Ils sont répétés à dimension l’identique sur le bâtiment, facilitant ainsi leur fabrication, qui reste artisanale, tout en augmentant la production. C’est une production à l’échelle du bâtiment, que l’architecte se permet grâce à l’artisanat.
Du « sur-mesure »
Via Vigoni
Les stores utilisés sur l’immeuble d’habitation rue G. Vigoni sont les premiers du type des stores « sur mesure ». Cet immeuble possède deux faces, une côté cœur d’ilot qui est plus sombre, moins travaillée, l’autre côté, rue plus noble, plus travaillée. « Plus travaillée » tout comme les stores présents sur les Bow-Windows en porte-à-faux sur la rue. Leur déploiement se fait en deux temps. Dans un premier temps, un ingénieux système fait glisser le tissu verticalement. C’est une tige qui translate dans deux rails périphériques qui fait courir le tissu parallèlement le long du vitrage. Ensuite dans un deuxième temps le tissu est entrainé par deux bras mobile, qui le déploient en arc de cercle sur un axe. Ce mouvement créé par ce système lui permet, une fois replié, de masquer le mécanisme dans un caisson rond, le protégeant ainsi des intempéries. Mais aussi une fois le tissu complément ouvert, les stores viennent couvrir au-delà du vitrage, abritant ainsi le logement des rayons du soleil. Ces stores font partie intégrante de la façade, ils sont indissociables de celle-ci, ce qui permet de les rendre complètement invisibles et indispensable au bâtiment.
2-Corso Italiana
Les stores utilisés sur l’immeuble mixte rue Corso Italia sont les deuxièmes du type des stores « sur mesure ». Du point de vue mécanisme, il est moins complexe que celui rue G. Vigoni, mais il est tout aussi élégant. En comparaison avec le store précédent, ils n’ont pas de caissons où vient s’enrouler leur toile. Ils ont à la place une sorte de marquise, qui vient abriter le mécanisme. Le profil des bras de ces stores est plus travaillé que ceux rue G. Vigoni. Ils sont courbés et viennent se loger entre les montants de la marquise, les rendant ainsi invisibles. Une fois fermés, ils sont à l’intérieure de la façade. Ils semblent faire qu’un avec le bâtiment, comme si on ne pouvait les démonter sans détruire la façade. Tout comme le store précédent, on sent la touche du designer, Luigi Caccia Dominioni, son désir de composition, d’esthétisme, d’élégance de chaque élément de son œuvre, de chaque objet.
3-Viccolo Santa Maria alla Porta
Les stores utilisés sur l’immeuble mixte rue Vicolo Santa Maria alla Porta sont les derniers de la série des stores « sur mesure ». On peut dire qu’ils sont le résultat des deux précédents, sauf qu’ils n’ont pas une forme classique. Vue de face, ils ne sont pas horizontaux, ils sont arqués. Leurs dispositifs cherchent à se fondre dans le décor comme ceux de rue Corso Italia, ils s’encastrent dans la façade. Une fois fermés ils sont totalement invisibles, on les confond avec les cadres des vitrines. Ils sont comme indissociables du bâtiment. Leurs bras se déplient tel des éventails. Comme les stores de l’immeuble mixte rue Corso Italia, leurs armatures sont courbées. Ce détail offre un confort aux piétons, leur permettant le libre passage le long des vitrines, tout en les abritant.
Conclusion
Luigi Caccia Dominioni s’est permis, dans toutes ses conceptions et grâce aux panels de protections solaires à sa disposition, de les faire varier et de se les approprier. Son côté designer a apporté une grande qualité à son architecture. Il conçoit les dispositifs qui lui manquent. Il pense ses ouvrages jusque dans les moindres détails, du gros œuvre à la poignée de porte. Tous au long de sa carrière il s’est constitué un catalogue d’éléments qu’il réemploie à sa guise. Il sera toujours aux yeux de tous un grand expérimentateur.
Par le biais de ses quatre « prismes » de travail, il s’est permis d’explorer différents domaines d’activités. Il entremêle ses connaissances pour concevoir des objets uniques. Il met également en scène tous les éléments qui composent un bâtiment. Il scénographie ses entrées d’immeuble (Cf. le mémoire : Les scènes d’entrée de CacciaDominioni, de Céline Labbé)3. Les matériaux qu’il utilise et les ambiances intérieures qu’il crée sont de qualité. Il a toujours travaillé avec les existants. Il développe les connectiques de ses bâtiments que ce soit avec le bâti ou visuellement avec leur environnement. Il développe les possibles.
Membre d’un des séminaires 2107 et 2018 conduits par Jérôme Guéneau et Gilles Sensini dans l’atelier Avec l’Architecture, au sein du domaine d’étude Préexistence.
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